La composition du concerto pour violon fut entreprise en septembre 2004 et achevée le 27 juin 2005. Hormis 6 semaines d’interruption, consacrées à la composition d’une œuvre vocale (ONXA), toute mon énergie a été investie dans ce travail. L’œuvre entière à été composée exclusivement durant les nuits. Cette pratique m’est coutumière et ne présente rien d’exceptionnel dans mon mode de travail.

Le projet d’une telle pièce remonte à longtemps, et des esquisses ont été faites dès 1996. Néanmoins, aucun des matériaux envisagés n’a été utilisé. Il m’a paru plus simple et efficace de reprendre tout et de faire table rase. Je n’ai cependant pas été sans ressentir l’influence de cette longue maturation étalée sur plusieurs années. Et je pense que l’ampleur qui se dégage de cette œuvre témoignera de cette profonde gestation.

Il est clair que l’appellation « concerto » est une déclaration d’intention. Je n’ai jamais vraiment pensé donner un titre autre, poétique ou évocateur, car le contenu n’a pas de référence autre que musicale et ne se réfère qu’à lui même. Il n’y a pas de volonté d’exprimer des sentiments, des idées, ou tout autre programme. Il ne s’est agit pour moi que d’exprimer ma musique, mon expérience intérieure. De la faire apparaître au jour. C’est en quelque sorte une construction. Plutôt abstraite. Libre à chacun d’y coller son imagination et ses propres fantasmes. J’embrasse cette forme – le concerto - pleinement, sans rien en rejeter. Je m’en sers comme d’un outil. C’est un enveloppe splendide qui peut permettre toutes les folies. Je me l’approprie. « Concerto pour violon » n’est donc pas un titre à proprement parler, mais une déclaration d’intention.

Le choix des protagonistes s’est imposé à moi très tôt. La situation de ce petit instrument en bois qu’est le violon, avec son gigantesque et prestigieux passé, ses quatre cordes dérisoires et son archet, faisant face à l’énorme machine qu’est l’orchestre symphonique représente un réel défi. Et si je prend au pied de la lettre le mot con-certo (certare = s’acharner, lutter), c’est qu’il s’agit bien d’une lutte, apparemment inégale du soliste avec l’orchestre, ou avec des groupes instrumentaux, ou avec d’autres solistes de l’orchestre. C’est une partition très exigeante, tant pour le soliste que pour l’orchestre – tant pour la virtuosité que pour la musicalité. Mais il s’agit également de la lutte du compositeur avec le matériau sonore. Ce matériau que j’expose, je tord, je frappe, je secoue, je contrarie, j’exaspère, je retourne, j’éclate, je chérie, j’ordonne, je volatilise, je brûle, je congèle, je martèle, je chante.

Je n’ai pas cherché à éviter des références. Je ne les ai pas recherchées non plus. Elles m’appartiennent, elles sont moi. Elles sont présentes, malgré moi et avec moi. Essayer de les distinguer et les pointer du doigt sera un bon exercice pour les esprits scolastiques. Je me suis senti maître d’une grande liberté et limité aucunement, ni par le néant, ni par l’abondance.

J’ai suivi un fil, et j’ai fait porter mon effort à tenter d’embarquer l’auditeur à mes cotés dans ce voyage riche en péripéties.
Ce voyage est organisé en trois étapes de proportions inégales (16-12-8) :

Mouvement I : Modéré – Accéléré/Glissé – (Cadence) – Choral – Accéléré

Mouvement II : Lent (Attacca)

Mouvement III : Vif – Fugato

Le « Concerto pour Violon et Orchestre » est une commande le l’association « musique nouvelle en liberté ».
La Sacem et l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg en ont permis l’édition.

Isabelle Faust a produit un grand effort pour mettre au point ce concerto. Je la remercie profondément pour le talent qu’elle met au service de cette œuvre, et je lui dédie.