" Une œuvre qui aurait pour thème l'Offertoire ". Telle était la proposition lapidaire de Dominique de Williencourt, initiateur du projet. Le violoncelle demeurait au centre de la pièce, mais la voix s'imposait à moi, jour après jour. De même qu'un fond, bleu azur, avec les cordes du quintette.

Je ne voulais pas de texte, seulement une sorte de vocalise variée. Mais très vite je ressenti le besoin d'articulations, de consonnes, et peut-être d'images. Afin d'en souligner l'ambition universelle et atemporelle, je me mis à la recherche d'un langage autre que ceux que nous fréquentons usuellement. Ancien, éloigné de nous. Beaucoup y passèrent. Le Copte, le Náhuatl, le Chaldéen, le Nacateca, le Numic et d'autres encore. Trop marqués, tous. Pas assez libres. Ma quête me conduisit vers le Silarg. Cette langue "artificielle" imaginée et mise au point avec passion par Jean-Pierre Mallaroni présentait bien des avantages: ses belles couleurs sonores, son aspect pré antique et futuriste à la fois, ses échos des multiples langues que j'avais visitées, mais également la simplicité et l'efficacité de ma collaboration avec son auteur, me décidèrent pour l'aventure. J'écrivis donc un bref texte, sibyllin mais précis. Mon offertoire.

Il s'agit de l'instant précis où l'arme sacrificielle va s'abattre, de cette fraction de seconde, de cette hésitation. Cet éclair d'instant captivait mon attention. Le temps devait être étiré, à l'infini. Mes mots furent transcrits en langue Silarg mon texte concis. Le travail était en route.

C'est alors que me vînt la notion d'une ellipse vertigineuse. Une ellipse de deux millénaires : du geste interrompu (Abraham sur le point de sacrifier son fils Isaac comme preuve de sa foi), au sacrifice consommé, celui du Christ. Et cette ellipse est mise en œuvre par un enchaînement direct avec le Pie Jesu du Requiem de Duruflé, en Latin. C'est l'œil étonné de la mère, la femme, la même, au pied de la Croix. ONXA. Rempli de larmes. C'est le cri de l'enfant qui naît et qui meurt. Ce cri qui continue de résonner dans les airs. Et qui peut encore être entendu.

Le "Pie Jesu" du Requiem de Maurice Duruflé peut suivre ONXA, sans interruption.

Date: 2005
Duree: 13 mn