REQUIEM:
NOTES D'INTENTION
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Le REQUIEM respectera l'ordonnancement de la liturgie traditionnelle.
Mais les textes vont être remodelés, sans doute " travaillés ". Le
texte de la Sibylle sera imaginé par Pascal. J'ai toujours souhaité
un requiem présentant une dualité, mélangeant profane et sacré. Donnant
de la mort une vision païenne aussi bien que sacrée.
Il devrait découler de cette confrontation une grande force, une synergie
spirituelle.
La musique que j'envisage reflétera naturellement ces deux aspects.
Echos de rites anciens et polyphonie sacrée trouveront un point de
rencontre, un point d'opposition, un point de possible épanouissement.
Le spectaculaire côtoiera des moments de pur recueillement. La Sibylle
nous guidera dans le monde des Morts, de même que Virgile, le païen,
guida Dante dans son voyage initiatique.
Il y aura donc alternance, mais davantage, ces deux mondes communiqueront
et participeront à une même polyphonie. La rugosité de l'un sera polie
par l'autre ; la douceur de l'autre, corrompue.
Au sein d'un même ensemble, l'espace musical sera conçu sur 2 plans
:
1/ solistes (soprano, ténor, baryton) et chœurs d'un coté
2/ de l'autre, une mezzo et 5 ou 6 instruments (instrumentation atypique).
Petit choeur.
L'orchestre sera le " médium ", au service de ces deux visions. Liant
l'une et l'autre. Ou les opposant.
Je suis conscient des difficultés acoustiques que représente la réalisation
d'une telle partition dans les lieux de culte et j'en tiendrai compte
dans sa conception.
Je joins quelques éléments complémentaires sur le projet, dont une
fiche technique, qui sera amenée à évoluer, bien sûr. Donc : à prendre
comme simple indication pour le moment:
Thierry Lancino
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Note d'intention de Pascal Quignard (novembre 2005):
" La lamentation traditionnelle du Dies irae commence par "Jour
de colère ce jour où le monde sera réduit en
cendres comme l'annoncent David et Sibyla". En latin: "Dies
irae dies illa solvet saeculum in favilla teste David cum Sibyla."
L'approche de la mort est double: peur et paix. Epouvaante et espérance.
Nous sommes doubles. Face au souhait de vie éternelle le désir
de mourir. C'est le mot de la Sibylle de Cumes dans Pétrone:
"Je veux mourir" En grec: "Apotanein thelô."
La liturgie chrétienne ne relaie que la prophétie de
David. Elle laisse en creux l'antre de la Sibylle païenne. La
Sibylle prophétisait en grec dans la baie de Naples. Sa grotte
s'ouvrait à Cuma près de la bouche des enfers de l'Averno.
Face à l'obsession paradisiaque et la crainte de l'enfer de
désir entêté d'en finir entièrement, totalement.
Laisser face à face ces deux désirs. Ces deux douleurs.
Ce requiem ne choisit pas: continuer immortellement, finir à
jamais, latin, grec, David, Sibyla. "
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